Le 14 juillet 2009, Michel Deparis, cadre dans un établissement technique, l’UPR, Unité de Pilotage Réseaux, se donnait la mort et laissait une lettre explicite sur la responsabilité de France Télécom dans son geste fatal. La 23ème audience, le 13 juin 2019, examine ce suicide, les circonstances qui l’ont précédé et son impact sur la prise en compte d’une crise, jusque là ignorée, par l’État et l’entreprise.
A cette occasion, ses anciens collègues lui rendent hommage , dans la lignée de la mobilisation collective et médiatique d’il y a dix ans : la lettre ouverte de ses collègues, leur rassemblement , les interviews télévisées, et un reportage suite à un communiqué de presse non siglé.
Ces suites judiciaires auraient-elle été possibles sans le travail du CHSCT (une instance que la Loi Travail et les Ordonnances Macron font disparaître) dans les mois qui ont suivi ? Son enquête, très documentée, à travers un GAP, Groupe d’Analyse et de Prévention, est édifiante.
Michel fut le 18ème à se donner la mort depuis février 2008. 18 en 18 mois!
Ce n’est plus un cas isolé, mais une série dont il faut comprendre l’origine, dont rend compte cette émission de France Culture de septembre 2009. Au cœur de cet été 2009, ce suicide marque un basculement dans les sombres années que vivent agents et salarié.es de France Télécom. « Il y a un avant et un après Michel Deparis » soulignera l’un des avocats des parties civiles, au cours du procès.
Basculement dans le domaine public, dans le débat public. Basculement dans la crise sociale ouverte. Basculement dans la réprobation générale.
Ce que révèle ce suicide : du mépris du travail, des méthodes de management, de la suprématie du financier, des situations de souffrance, dans lesquelles des milliers, des millions de salarié.es se reconnaissent.
Que ce fut ce suicide-là, le point de bascule, ne tient pas seulement à une conjoncture : la pauvreté des événements médiatiques en cette fin juillet, le tour de France terminé, la publication des résultats trimestriels positifs de France Télécom, les médias qui se jettent sur le sujet comme des guêpes sur un verre de bière en plein été. Cela tient aussi au comptage des morts tenu par l’Observatoire du stress et de mobilités forcées à France Télécom, et rendu public sur son site.
Le 5 juillet 2019, le Ministère Public demande l’application des peines maximales pour les ex-dirigeant.e.s de France Télécom. Nous n’en attendions pas moins.
Le verdict sera rendu le 20 décembre 2019, à10h.