- Christophe
- ORANGE
- 2005
- Paris
PLAINTE
À Monsieur le Procureur de la République
Près le Tribunal de Grande Instance de Metz.
Je soussigné G. Christophe demeurant xxxxxxxxxxxxx à Metz (Moselle) exerçant la profession de technicien chez France Telecom S.A à Aubervilliers.
Ai l’honneur de porter plainte entre vos mains contre X en raison des faits suivants:
Article 6 quinquies de la loin°83-634 du 13 juillet 1983 :
Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Entré par concours externe le 26 mai 1992 à France Telecom, j’ai subi la transformation de l’opérateur en société privée. En opposition avec les conséquences de cette démarche, dont la plus grave pour moi fut l’arrêt des mutations en province ; j’ai cherché à partir en détachement dans une administration, ce que j’ai réussi en mars 2002. Malheureusement, je n’ai pas été intégré et j'ai été remis à la disposition de France Telecom le 1 septembre 2003.
Affecté à l’Unité Réseau Régional Ile de France Est sur le site 21 rue de la motte à Aubervilliers (dont le siège est au 226/236 avenue Henri Barbusse à Bobigny), je n’ai pas de travail réel, n’étant pas apte au poste imposé (qui est d’un grade inférieur au mien).
La visite médicale de reprise a confirmé une dégradation de mes problèmes de santé (je suis travailleur handicapé reconnu par la Cotorep, mais France Telecom le néglige) et a conduit ma hiérarchie à me considérer comme « inemployable », et donc à me placer dans ce « placard ».
Malgré de nombreuses relances, je ne suis pas passé en Comité Médical seul compétent pour prendre une décision sur mes difficultés (je demande un reclassement). Cela fait dix sept mois que je suis sans travail (mais je dois être présent). Les personnes compétentes pour prendre une décision sont: Mme L. S., responsable ressources humaines de l’unité.
M. J. R., directeur actuel de l’unité (succède à M. L.).
Cette situation a les conséquences négatives suivantes :
- habitant en province, je viens en train et loge à l’hôtel (car France Telecom a refusé de me réintégrer sur mon département). Je suis éloigné de ma famille et le coût n’est pas négligeable.
- impossibilité de prendre une décision concernant un éventuel logement puisque mon affectation est provisoire.
- non-respect de mes droits et de ma dignité : non application des lois et décret concernant les personnes handicapées, non application d’un accord interne su l’emploi des handicapées (juillet 2003).
- dégradation des conditions relationnelles, c’est à dire de la reconnaissance de ma place au sein du service (critique de collègues sur mon inactivité)
Cela conduit à une dégradation de la condition humaine, c’est à dire du respect de ma personne.
En remettant en cause mes droits et ma dignité, France Télécom veut me culpabiliser, détruire l’image que j’ai de moi-même, de mon rang dans l’entreprise et du service, provoquer un état de stress traumatique et chronique (c’est le cas) avec le cortège de symptômes anxio-dépessif et psychosomatique pouvant m’invalider lentement, voire me conduire au suicide (qui sont en progression dans l’entreprise).
- il y a donc une dégradation de ma santé physique et mentale : lombalgie réactionnelle, sentiment d’inutilité, peur du lendemain, appréhension à la reprise du service, insomnie, stress.
- compromettre mon avenir professionnel : cette situation m’exclu de toutes possibilités de promotions, j’ai un vide dans ma carrière qui sera difficile à expliquer devant un autre employeur, car en laissant «pourrir» ma situation, je suis clairement poussé à la démission sans les garanties liées aux procédures de licenciement, dans des conditions personnelles et sociales particulièrement négatives.
Les évènements qui se passent à France Telecom et se rapportant à ma situation comme dénoncé ici, ont fait l’objet d’une question de Mme la Sénatrice Beaudeau en février 2004 : et dévoilé au grand public par la sortie du livre de Dominique Decèze « La machine à broyer, quand les privatisations tuent : France Telecom » début septembre de la même année.
C’est pourquoi, Monsieur le Procureur de la République, j’ai l'honneur de porter plainte entre vos mains en vous priant de donner à cette affaire la suite légale qu’elle comporte, et vous prie de croire en mes très respectueux sentiments.
Le 02 février 2005
M. G. C.
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REPUBLIQUE FRANCAISE MINISTERE DE L'INTERIEUR
PROCESS VERBAL
L'an deux mille cinq, le vingt sept octobre à neuf heures cinquante
Nous, xxxxxxxxxxx
Capitaine de police en fonction SIR METZ
Officier de Police Judiciaire en résidence 57000 metz
Conformément aux instructions du Parquet de METZ, en date du 19 septembre 2005, sous le n° xxxx/05 transmises sous le n° xxxxxx J/05,
Avons mandé et constatons que se présente la personne ci- après nommée qui nous déclare :
1°} SUR SON IDENTITE :
Je m'appelle Monsieur Gxxxxx Cxxxxxx, je suis né le 13 mai 1964 à Lxxxxxx, de nationalité française, demeurant n° xxxxxxxxxxxx à 57160 MOULINS LES METZ, Tél 03.xxxxxxxxx.
Actuellement je suis en recherche d'emploi depuis le 13 septembre 2005.
Avant cette date j'étais employé depuis le 26 mai 1992 par FRANCE TELECOM en qualité de Conducteur de Travaux. Je suis célibataire et je n'ai pas d'enfant.
2°) SUR LES FAITS :
Effectivement je suis bien l'auteur de la lettre adressée à Monsieur le Procureur de la République datée du 2 février 2005, dans laquelle j'exprime mes doléances à l'encontre de FRANCE TELECOM.
En effet, j'ai intégré cette Administration encore à l'époque le 26 mai 1992 par voie de concours externe, afin d'occuper un poste de Conducteur de Travaux. Tout d'abord nommé après ma formation en Seine et Marne, à LAGNY, j'ai travaillé jusqu'en 2001 au Centre Principal d'Exploitation.
Ce qui m'a heurté principalement c'est que d'emblée, on m'avait assuré , mais seulement verbalement, selon un contrat moral, qu'il fallait passer seulement 5 années en région parisienne, et au terme de cette période, je pouvais espérer être muté en province.
En 1997, le Gouvernement ouvre le capital de FRANCE TELECOM, et les mutations sont arrêtées. Je me suis estimé trompé et j'ai entamé une résistance passive, je veux dire par là que tout en continuant à faire mon travail, je rejetais la nouvelle politique uniquement par mes propos seulement.
J'ai été rapidement mal perçu, ce qui a conduit FRANCE TELECOM en 2001, à me muter sur un poste d'un niveau d'une catégorie inférieure à mon statut. Parallèlement, j'ai constitué un dossier COTOREP, suite à un dégradation de mon état de santé, j’ai été reconnu, à partir du ler février 2001, travailleur handicapé classé en catégorie B.
J'ai alors demandé un emploi adapté à mon handicap, mais FRANCE TELECOM m'a tout de même maintenu dans le Poste d'Agent des Lignes, emploi qui requiert un déploiement de force physique que je n'avais pas.
Pour moi, cette situation traduisait déjà une forme de harcèlement moral.
Ensuite, à la fin 2001, profitant de la fusion des deux départements, la Seine Saint-Denis et la Seine et Marne, la Direction de FRANCE TELECOM me mute à BOBIGNY sur un emploi soit-disant "meilleur" pour ma santé, j'ai donc travaillé au Centre d'Unité Réseau Régional jusqu'à mon départ en détachement que j'avais sollicité pour le C.N.R.S. à la fin de février 2002.
Malheureusement le CNRS n'ayant pas souhaité m'intégrer, j'ai été remis à la disposition de FRANCE TELECOM, à compter du ler septembre 2003.
A cette date , je suis affecté à l'Unité Réseau Régional sur le site d'AUBERVILLIERS (93) sur un poste qui n'est pas compatible avec mes problèmes de santé constatés par le Médecin de Prévention lors de la visite de réintégration.
FRANCE TELECOM m'a alors considéré comme "inemployable", et m'a laissé à AUBERVILLIERS, mais sans aucun travail réel. De la journée, je n'avais absolument aucune tâche à exécuter par contre je devais être présent et respecter strictement les horaires.
Je me suis effondré moralement, et je suis tombé en dépression à partir de novembre 2003, et là mon état nécessitai absolument la prise quotidienne d'antidépresseurs.
J'ai ensuite lutté pour obtenir une expertise médicale nécessaire au passage en Comité Médical, seul organisme habilité à donner un avis sur mon état de santé, je l'ai obtenu cet avis le 26 mai 2005. À partir de cette date j'ai demandé légitimement à occuper un poste adapté à mes handicaps, mais FRANCE TELECOM a laissé traîner cette demande, me sentant moralement affaibli puisque j'en étais réduit à travailler à mi-temps pour pouvoir supporter les contraintes d'environnement , des trajets, des mauvaises conditions de logement, et surtout de la mauvaise ambiance du service, de tout ce préjudice moral accumulé.
En juin 2005 je suis parti en congé d'été annuel jusqu'au le août 2005, qui s'est prolongé du fait que j'ai dû être hospitalisé pendant cette période, pour un autre motif. A mon retour, j'ai demandé à mon supérieur si une décision avait été enfin prise suite aux conclusions du Comité Médical, pour obtenir en finalité un poste adapté à mon handicap.
Il me répond que rien n'a avancé et je lui dis que je ne retournerai pas à AUBERVILLIERS à ne rien faire de la journée et que j'attends une proposition de poste.
Pour toute réponse j'ai reçu une mise en demeure se bornant constater mon absence "irrégulière", et et qui a permis à FRANCE TELECOM de mettre en place la procédure de radiation des cadres pour “abandon de poste".
Cette décision finale m'a été notifiée le 13 septembre 2005. Je vous fournirai la copie de ma notification de radiation ainsi que mes courriers du mois d'août 2005, qui expriment une tentative d'arrangement à l'amiable.
Il faut que je dise pour terminer ma déposition que FRANCE TELECOM a refusé de m’appliquer l’accord réservé aux personnes handicapées, qui aurait permis de trouver une autre issue. Je dépose plainte par conséquent contre FRANCE TELECOM, pour des faits de harcèlement moral et le préjudice moral et matériel que j’ai subi gravement depuis plusieurs années.
Je ne vois rien d’autre à ajouter.
Après lecture faite personnellement, l’intéressé persiste et signe avec nous le présent à onze heur cinq.